Sans titre 1

UNE HISTOIRE DE FAMILLE…..

                                                                                                                                     par RENE GIRIN

Je me souviens que ma mère me disait lorsque j’étais adolescent, dans les années 50, sur un ton sévère et qui n‘admettait aucune répartie :

« Et, surtout, n’épouse pas une allemande. Je ne veux pas de {ça, chez moi} »

Sur le moment, je me demandais pourquoi une telle haine des allemands.

En étudiant plus tard l’histoire de ma famille, comme celle de beaucoup de français, je compris pourquoi ma mère avait réagi avec une telle violence.

En 1870, mon arrière-grand-père : ETIENNE GIRIN, né en 1845 à MARINGES, maçon, soldat en 1866, combattit les prussiens (futurs allemands) à SEDAN, sous les ordres de l’Empereur NAPOLEON III et, fut fait prisonnier et interné en POMERANIE (à l’est de la Prusse).

Suite au Traité de FRANCFORT SUR LE MAIN, il fut libéré le 10 mai 1871…  mais la France avait perdu l’ALSACE et une partie de la LORRAINE. Il continua son service militaire (qui durait 5 ans, à l’époque) et, sera finalement libéré de ses obligations militaires en 1872. ETIENNE GIRIN revint donc, sain et sauf de cette guerre.

Son fils, mon grand-père, ANTOINE GIRIN, né le 24 mars 1878 à MARINGES, – taille 1.56m – détail qui aura son importance – maçon, fut  versé le 1er septembre 1912 dans l’armée territoriale à l’âge de 34 ans – (réserve). Vu son âge, il ne fut pas appelé en 1914, à la déclaration de guerre contre l’Allemagne.

 Mais, il n’échappa pas au conflit et fut appelé dans les Services Auxiliaires, le 8 janvier 1915 et, incorporé dans le 103ème Régiment d’Infanterie, à MONTBRISON. Après une instruction militaire très poussée dans la région de BOEN (cantonnement au patronage) il fut versé dans le 13ème Régiment d’Infanterie à NEVERS, le 17 mars 1916 où, l’instruction très dure continua (marches, tirs au fusil, grenade….) puis, à la CHARITE SUR LOIRE.

Et enfin, DEPART POUR LE FRONT, le 23 juin 1915 – région de CHALIN LE GAL et GAUCOURT puis, FRESNICOURT (PAS DE CALAIS). Là, la préparation s’intensifie avec entraînement pour aller dans les tranchées.

Ce qui suit, a été relevé dans le carnet de bord de 1915, de mon grand-père.

« Le 6 juillet 1915 : le matin, rapport à 11 heures, puis le soir, départ pour les tranchées, lutte toute la nuit en première ligne – C’est AFFREUX, AFFREUX, AFFREUX. C’est indescriptible. Je ne pense plus revoir femme et enfants – Adrien mais espoir quand même.

Le 7 juillet 1915 : toujours canonnade intermittente et à 7 heures, attaque des tranchées ennemies. Nous en avons pris une, avec beaucoup de pertes de notre côté. De leur côté, je n’en sais rien. Enfin, j’ai reçu un joli baptême de feu. Ce n’est pas possible. On s’est touché la main avec GIRARD, ne croyant pas d’en revenir en vie. 

J’ai eu mon képi troué par 2 balles allemandes – bien reçu, le baptême du feu.

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Le 8 juillet 1915 : toute la journée à tirer. On n’a pas attaqué ce jour mais, le soir, violente canonnade, TERRIBLE… TERRIBLE.

On nous a relevés et nous sommes allés cantonner à ABALAIN ST NAZAIRE, sous une pluie de feu, tout au long de notre chemin dans des boyaux.

  • Je ne sais pas comme je fais d’être encore en vie ce jour –

ABALIN ST NAZAIRE n’est plus qu’un monceau de ruines. On ne peut rien décrire mais toujours ESPOIR ».

Par la suite, mon grand-père fut affecté aux cuisines puis ensuite à nouveau, en 1ère ligne, avec souvent, le portage des repas aux poilus. Il eut sa première permission le 28 décembre 1915. Au retour, affecté en 2ème ligne et temps passé à creuser des boyaux ou, nettoyer ceux existants.

Malheureusement, je n’ai pas trouvé dans les archives familiales, le carnet de bord des années suivantes. Je sais seulement pour l’avoir entendu dire par mon père, qu’ANTOINE GIRIN est allé combattre à CRAONE et surtout à VERDUN. Je n’ai pas d’autres informations. L’Armistice signée le 11 novembre 1918 a mis fin à ses souffrances. Il est revenu, très marqué par tout ce qu’il avait vécu, mais en relative bonne santé. Il fut renvoyé dans ses foyers le 31 janvier 1919.

 Le traité de VERSAILLES signé le 28 juin 1919 mit définitivement fin à cet horrible conflit. L’ALSACE et la LORRAINE redevinrent françaises mais, ce traité portait en lui, les germes d’une future guerre. Ce qui fut le cas, l’ALLEMEMAGNE revancharde malgré les conditions imposées par le Traité de VERSAILLES se réarma et installa un régime nazi avec HITLER.

Mon père MARCEL GIRIN, Directeur d’Ecole, né le 26 août 1905 à MARINGES – classe 25, fut appelé pour faire son service militaire, le 19 novembre 1927 en RHENANIE occupée par les français suite aux conditions du Traité de VERSAILLES Je l’ai souvent entendu dire que les allemands détestaient les français.., qu’il y avait beaucoup d’incidents et, même des manifestations hostiles à la FRANCE. Le 3 septembre 1939, mon père fut donc appelé sous les drapeaux au 238ème Régiment d’Infanterie, à l’âge de34 ans.

L’Allemagne ayant attaqué notre alliée la POLOGNE le 1er septembre 1939, entraîna la déclaration de guerre pour la FRANCE et l’ANGLETERRE.

Tout l’hiver 39/40, il séjourna dans les VOSGES sans aucune grande action. Par la suite, le conflit s’affirma et mon père fut fait prisonnier le 21 juin 1940 en ALSACE à WESSERLING puis, transféré dans un camp à NEU-BRISACH puis, à BONN. Il eut la chance de revenir avec de faux papiers, dans l’été 1943 (soit, 2 ans avant les autres  soldats français).

Mes trois aïeux revinrent donc indemnes des 3 conflits mais, moralement…. c’est une autre histoire. Je comprends donc, la réaction de ma mère mais finalement, son mari étant revenu vivant… sans blessure… elle commença à changer d’avis surtout au moment de la naissance de l’EUROPE, au moment du TRAITE DE   ROME, le 25 mars 1957. Elle fut particulièrement impressionnée par la cérémonie du Souvenir à DOUAUMONT, le 22 septembre 1984 où, le Chancelier allemand KOHL et le Président français François MITTERAND, se prirent par la main…

Par la suite, elle devint même, une partisane absolue de la réconciliation d’autant plus que son petit-fils, ERIC GIRIN, lors d’un séjour aux USA, fit la connaissance d’un jeune allemand très francophile, avec lequel, il a gardé des relations suivies. Ma mère fut enchantée et apprécia ce jeune allemand.

Voici donc, une histoire de famille comme beaucoup d’autres, l’ont connue….

Merci à l’auteur qui en accepte la publication.

Ci-dessous, quelques éléménts de l’exposition du collège Jacques Brel et confiés par Mr Girin. Cette exposition organisée par les élèves du lycée et du collège reste visible jusqu’en juin 1919. Elle vaut le déplacement!

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