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Le Plagnal (CP M. Rivoire)

En continuité avec les recherches que mène PHIAAC sur la colonie du Plagnal et dans l’intention d’éditer plus tard un livre-souvenir, Nous vous proposons dans cet article les souvenirs d’un jeune pelaud d’hier qui allait pendant l’été s’aérer sur ces hauteurs de l’Ardèche, près de l’Allier. C’est une incitation pour tous ceux qui ont été à la colonie depuis 1947 à nous adresser, eux aussi leurs souvenirs.

Cela peut se faire par courrier à Michel Rivoire « Le Richarme », 42140 Saint-Denis-sur-Coise (qui centralise les informations) 

ou par mail sur texte word et photos si existantes en jpeg adressés à       phiaac42140@gmail.com

 

LA CITÉ DES FARLOTS ET LA COLONIE DU PLAGNAL

Quelques souvenirs par Michel RIVOIRE (un pelaud*)

 Nous étions quelques pelauds parmi de nombreux Farlots… et, durant 3 années consécutives 1962, 1963 et 1964, j’ai passé un mois, du 15 Juillet au 15 Aout, à la colonie du Plagnal, «la cité des Farlots».

La première année, tout fut nouveau pour moi. Les paysages étaient différents, la végétation aussi ; je me souviens particulièrement de la taille gigantesque des genêts. Nous étions loin de tout ; le village ne comptait que quelques maisons autour de l’église. Les habitations étaient en grosses pierres brutes non jointées et les gens avaient un accent. Les vaches, de couleur rougeâtre, ne ressemblaient pas aux vaches de chez nous. Il n’y avait pas de grosses fermes. Les foins se faisaient plus tard. Cet endroit me paraissait en retard par rapport aux deux villes que nous venions de quitter. Je découvrais la vie en collectivité, quittant pour la 1ère fois ma cellule familiale. . Je faisais la connaissance des chazellois et découvrais leurs surnoms : Ramsès, La Yette, Bissouille, Pépito…

Nous arrivions en car surement avec Les Cars Bertrand : «La Flèche Bleue». Nous passions par Beauzac, Retournac, Le Puy et Langogne. Le voyage me semblait interminable.

Je me souviens une année, au retour, nous nous étions  arrêtés au Château de Polignac. Je n’avais jamais vu un château fort, seulement dans les livres ! Nous nous étions  promenés sur les chemins de ronde.

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Une photo du car qui nous conduisait au Plagnal

Selon notre âge, nous étions répartis en équipe, à chaque équipe une couleur de foulard.

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Photo prise au pied de l’escalier Sainte Clotilde qui montait au dortoir

Si les foulards permettaient d’identifier l’équipe, des insignes, écussons ou médailles, confectionnés souvent en feutre, permettaient de repérer les plus braves, les plus méritants !

Je me souviens particulièrement d’une insigne : celle d’un avion que nous portions tous fièrement. Nous avions préparé la visite d’un pilote de ligne chazellois. Je sais aujourd’hui qu’il s’agissait de Monsieur Chauve, pilote à Air France. Il nous intimidait, même les plus hardis…

Nous qualifierions aujourd’hui la discipline imposée de «militaire» : levée du drapeau le matin devant les colons en rang par couleur de foulard, beaucoup d’activités physiques. On marchait beaucoup et on chantait aussi beaucoup en marchant Nous faisions beaucoup de jeu, souvent en compétition entre équipe.

On connaissait les règles et nous devions les respecter ou du moins ne pas être pris car nous étions rappelés à l’ordre… Pourtant, j’acceptais bien ces contraintes et même j’ai aimé ces moments-là : les copains, la découverte de nouvelles activités, de nouveaux jeux collectifs, de nouveaux paysages…. La région était belle et nous l’arpentions  toujours à pied: Saint Alban en Montagne, Lanarce, Issanlas, Le lac d’Issarles, Saint-Cirgues-en-Montagne, l’auberge de Peybeilles (la fameuse auberge rouge connue pour la disparition de ses voyageurs au XIXème siècle), La Trappe de Notre-Dame des Neiges où j’ai découvert le nectar fabriqué par les moines, un vin champagnisé : « la Fleur des Neiges »…

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Carte postale du lac d’Issarles

On nous interdisait de nous baigner dans ce lac car soit disant, c’était un lac de volcan, très profond avec un remous au centre qui ‘entrainait vers le fond.

Je ne sais pas dans quel village (Saint Cirgues ou Lanarce), on voyait un rocher de couleur rouille d’où coulait une eau très ferrugineuse impossible à boire. A côté, il y avait une source d’eau très chaude.

Parfois, nous partions pour plusieurs jours, sac à dos. Nous dormions dans des granges. C’est une vieille 2 Chevaux camionnette qui nous apportait le ravitaillement.

Certains anciens colons disent que nous pouvions parcourir plus de trente kilomètres par jour ?

Lorsque nous restions au Centre, le matin était dédié aux travaux manuels et au bricolage .Nous faisions des tableaux en plâtre en utilisant l’eau que nous allions chercher à la rivière, des pieds de lampe que nous découpions dans du contre-plaqué avec une scie très fine.

L’après-midi, le plus souvent, nous partions dans les forêts alentours pour se combattre, équipe contre équipe. On s’accrochait, à notre ceinture, dans le dos, un morceau de tissu de couleur. Il ne fallait pas se le faire arracher car on était «mort».

Les jours de pluie, les moniteurs nous occupaient au centre en nous passant des films genre Tintin ou en nous lisant des romans d’aventure, du genre Michel Strogoff,  par épisodes.

Au-dessus du village, il avait été aménagé un terrain sommaire, presque plat, que nous utilisions pour les parties de foot et aussi pour des sortes de jeux olympiques.

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L’équipe de foot pose pour la photo avant le début de match.

Souvent, nous allions au bord de l’Allier. En se servant d’une fourchette comme harpon, nous attrapions des poissons à tête plate. Il y en avait beaucoup dans cette rivière. 

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On fait un brin de toilette ou simplement on se rafraichit  au bord de l’Allier.

 Au moment du goûter, nous étendions un drap sur l’herbe. Chacun avait droit à une grosse tranche de pain et une grosse barre de chocolat noir. Il y avait «du rab» pour ceux qui avaient encore faim…

Je ne me souviens pas que nous devions participer aux tâches ménagères quotidiennes.

Nous prenions nos repas dans une grande pièce voutée avec de gros piliers en pierre, aménagée en réfectoire. Cela me faisait penser à une salle de château fort.

Beaucoup de soirées se terminaient par un feu de camp et des chants.

Quelquefois, les moniteurs organisaient des sorties nocturnes. Les grands faisaient peur aux plus petits ! Les moniteurs avaient des lampes et nous marchions dans la nuit. La dernière année, ils s’étaient équipés de gros projecteurs qui éclairaient très loin, jusqu’au Chapelat.

Le Chapelat était un lieu important pour la colonie. C’était le sommet d’une colline qui dominait le village, un genre de calvaire avec 3 croix dont une centrale beaucoup plus haute que les autres. C’étaient des anciens de la colonie qui avait transporté et installé ces croix. Il y avait plusieurs chemins pour arriver au sommet. Le plus direct, tout droit, en face, était quasiment impraticable. En effet, la face qui regardait le village était couverte d’éboulis peut être de provenance volcanique. Du village, sur cette colline, on voyait vaguement la forme d’une main ; les roches étant rouge, on l’appelait «la main rouge»

Au mitan de la colonie, il y avait chaque année la visite des parents, un moment important. Je cédais mon lit à ma mère et je dormais avec mon père, les autres pères et les colons dans la grange. Pendant ces deux jours, c’était la fête…. avec de nombreuses activités, des jeux que nous partagions avec les parents et les frères et sœurs venus en visite.

 

 

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Sur cette photo, vous remarquerez que les colons portent tous leur foulard.
Au 1er plan, avec le foulard blanc, un jeune moniteur.

La dernière année, j’étais dans l’équipe des grands ; les moniteurs cherchaient à nous responsabiliser. Lors des marches de plusieurs jours, au bivouac, c’est nous qui choisissions ce que l’on voulait manger. Nous avions une enveloppe d’argent pour les achats. Je me souviens d’un repas où nous avions décidé de faire nous-même nos chips….

Nous avions vite compris que l’argent dont nous disposions ne permettait pas de satisfaire toutes nos envies !

Le Plagnal, malgré un encadrement strict, c’était l’aventure, avec plein de découvertes et un sentiment de grande liberté. Ce fût pour moi de belles vacances et aujourd’hui ce sont de très bons souvenirs.

(*) : habitant de Saint-Symphorien-sur-Coise