Chazelles revendique depuis des siècles le statut de capitale du chapeau de feutre en poil animal. Cette activité a bien sûr aujourd’hui disparu mais domporte toujours une merveilleuse vitrine des activités d’hier avec l’Atelier Musée du Chapeau qui ve cesse d’éblouir avec ses expositions temporaires thématiques da qualité remarquable. On sait aussi que depuis près de 80 ans, la ville est une des capitales des bougies d’allumage pour moteur thermique. L’histoire a commencé avec la célèbre KLG et se poursuit aujourd’hui avec Fédéral Mogul qui fournit 50.000.000 de pièces annuelles avec près de 350 ouvriers et une école de formation.
Ce que l’on sait moins, c’est que la ville fabrique aussi ses saucissons dans une unité de production qui regroupe plusieurs dizaines de salariés : Les Salaisons de la Brèche sur la zone de Montalègre. La maison est née en 1991. Une de ses spécialités est d’ailleurs le Chazellois, un saucisson qui peut sans honte rivaliser avec le célèbre Cochonou de Saint Symphorien-sur-Coise, cité qui revendique à quelques kilomètres de distance le titre de capitale de cette variété de charcuterie étant aussi à juste titre le berceau de la célèbre rosette de Lyon. On y trouve quatre grosses unités de production avec notamment Cochonou, déjà cité, France Salaison ou Chillet. Il s’est même créé cette année dans cette ville la « CONFRÉRIE DE LA NOBLE ROSETTE, DU FIN SAUCISSON ET DU BON JÉSUS ». Cette société voudrait réfléchir sur des actions pérennes à créer dans cette ville pour honorer les variétés alimentaires issues du cochon.
Il faut déjà lui suggérer que toute action allant dans ce sens commence à Chazelles car c’est ici que se trouve le sanctuaire du Cochon. Il faut en effet se transporter à la chapelle dite «Verpilleux» pour retrouver une vénération ancestrale par vitrail de cet animal avec son maitre Saint Antoine le Grand, patron des bêtes féroces dont le sanglier. Le cochon n’est que la forme humanisée ultérieure de ce mammifère omnivore, forestier.
Antoine, enfant d’agriculteurs égyptiens et fervents chrétiens, est orphelin à dix-huit ans et devient alors ermite dans le désert après avoir donné ses biens. Il fonde une communauté des chrétiens vivant dans la pauvreté à l’ouest et à l’est du Nil. Puis il construit un monastère vers Gaza, puis Thébaïde. Toujours accompagné d’un cochon à clochette, dit-on: on l’appelle d’ailleurs Saint Antoine des cochons. Vers 1100 un ordre est créé : celui des Antonins qui adoptent les règles de vie du Saint Patron. C’est ainsi qu’iis peuvent élever librement ces animaux pour nourrir les pauvres et alimenter leurs petits hôpitaux. Cette tradition est restée dans l’église chrétienne copte, notamment en Egypte autour du Caire, et l’image de Saint Antoine devient indissociable de celle de l’animal, choisi ainsi comme le patron des charcutiers. Quand il meurt à 102 ans (?), ses reliques sont déposées à Constantinople puis une partie est transférée en Isère par un chevalier dauphinois mais aussi à Arles et en Russie Elles vont être vite renommées en Dauphiné pour guérir le « mal des ardents »,ergotisme ou feu de la Saint-Antoine ou Saint-Martial. Il n’en faut pas plus pour fonder un monastère sur place, celui que l’on connait aujourd’hui notammment comme la place du festival de Saint-Antoine-l’Abbaye avec son célèbre orgue.
Cette Chapelle Verpilleux, incluse dans le champ des Morts de Chazelles, possède ce magnifique vitrail représentant le Saint Antoine des Cochons, dit le Grand, ou l’égyptien et accompagné de son superbe mammifère omnivore bien en chair ! Il y a aussi Saint Louis, roi de France et Saint-Simon le Zélote, un éventuel frère de Jésus, avec sa célèbre scie. Cet instrument ne sert bien sûr à priori en rien à aider son ami Antoine à couper le cochon pour en faire du saucisson. C’est l’outil qui l’a martyrisé en Perse, sa zone d’évangélisation choisie après la mort du Christ. Il aurait, selon une égende, été scié vivant en morceaux. Il est devenu, pour ce qui le concerne, patron des tanneurs de façon tout à fait curieuse par une suite de confusions entre les noms: c’est l’association des noms de Simon Pierre (Saint Pierre) et de Simon le corroyeur, son logeur, dans les textes anciens avec une confusion qui s’est établie avec Saint Simon, autre apôtre, qui explique pourquoi les tanneurs et les corroyeurs l’ont choisi pour patron.
Ne serait-il donc pas normal de faire annuellement un pèlerinage depuis cette chapelle de Chazelles qui honore le patron des charcutiers et des tanneurs pour se diriger vers Saint Symphorien. Le cochon est d’ailleurs tout prêt à suivre le cortège en direction de la Coise pour être transformé en Jesus.
En attendant, il serait urgent de protéger ce magnifique vitrail d’Alexandre Mauvernay, seul vestige restant d’un art funéraire somptueux qui rappelle la présence en ces lieux de Louis Néel, Antoine, Simon Verpilleux, alors maitre-chapeliers ou Antoinette Verpilleux.