Châtelus aurait pu rester le gendarme de la région tant il est bien placé pour la surveiller. Il n’en a pourtant, au cours des siècles, conservé que le chapeau qu’a dû lui donner Chazelles pour couvrir encore aujourd’hui le “a” dans son nom!
Blotti dans un écrin de verdure, le village vous voit arriver par la route avant même que vous n’aperceviez finalement la haute tour-donjon de son château et le clocher très atypique (pour la région) de son église, après une route sinueuse qui vous amène au bord du bourg. La rue principale, toute en pente, vous emmène de l’entrée du château, avec sa belle grille et en face la fontaine du voyageur, au tertre du Chatelard où se trouve la reproduction récente de la croix des Bénéon (la croix originale se trouve aujourd’hui protégée dans l’église). On a croisé en route l’église et la mairie. Là, on y découvre un panorama magnifique qui permet tout de suite de comprendre pourquoi, depuis des millénaires, cet endroit a été choisi: permettre la surveillance éventuelle de la région : ici, presque comme depuis le donjon, on regarde très loin, et beaucoup, sans être vu.
Géographie.
Châtelus est situé dans le département de la Loire en région Rhône-Alpes. Il appartient à l’arrondissement de Montbrison et au nouveau canton de Feurs ayant absorbé celui de Chazelles-sur-Lyon dont il dépendait encore en 2014. Le village fait aujourd’hui encore partie de la Communauté de communes “de Forez-en-Lyonnais”.
La population de Châtelus était de 126 en 2009 et de 129 en 2014. C’est un nombre qui a tendance à croître depuis quelques années : la qualité de vie y est certainement pour quelque chose en l’absence de nombreuses commodités. Les habitants de la commune sont appelés les Châteludaires. On est en petite montagne avec une altitude moyenne de 680 mètres au niveau de l’église et de la mairie. Les communes toutes proches sont : Coise à 2 km, Marcenod à 3 km, Larajasse à 3.5 km, Grammond à 4 km tout comme Saint-Denis-sur-Coise, distances à vol d’oiseau!
Le village est bâti entre le Couzon, rejoignant la Coise au Pont Français et le Dard de Coise qui se jette dans la première rivière citée tout en bas du village.
Histoire.
D’après la tradition, les Romains s’établirent au confluent du Dard-de-Coise et du Couzon et y élevèrent des fortifications. Ils lui donnèrent le nom de «Castrum Lucus» (le camp de Lucius). Au cours des âges, l’orthographe du nom du village a évolué : «castellutium», «castelus», «chastellus», «châtellus» et, enfin, « châtelus ».
Aux X°, XI° et XII° siècles, le village prend de l’extension et le château monumental acquiert une grande importance. Il appartient aux comtes du Forez. À la signature de la «Permutatio» de 1173, Guy II, comte du Forez, cède à Guichard, archevêque de Lyon, plusieurs propriétés mais se réserve Châtellus, Chevrières et Fontanès. L’église du village reste sous la dépendance de l’île Barbe de Lyon. Le site devient un poste frontière entre l’empire germanique et le royaume de France et reste ainsi propriété personnelle des comtes de Forez. En 1360 il tombe sous la dépendance des Ducs de Bourbon qui en font une capitainerie, puis en 1368 une châtellenie comtale. A la place du seigneur, réside un châtelain qui rend la justice, lève les impôts, commande une garnison et étend son autorité sur Larajasse, Saint-Christo, Marcenod, Grammont, Saint-Denis-sur-Coise et Coise. Parmi ces châtelains, il faut signaler la famille notariale des Terrasson.
En 1465, le village est assiégé, comme les autres place fortes de la région et notamment Chazelles, par les troupes milanaises de Galéas Sforza, venu prêter main forte à Louis XI se battant contre la Ligue du Bien Public dont Jean II de Bourbon, qui règne alors sur le Forez, fait partie. C’est à cette époque que Chevrières est, à l’inverse, envahi par les «ligués». Ils chassent les Mitte, fidèles de LouisXI. Ces derniers se réfugient alors à Grézieu-le-Marché. A la paix de Conflans, en octobre de cette même année, les troupes étrangères se retirent.
En 1513, Anne de France, fille de Louis XI, comtesse usufruitière du Forez, cède Châtellus, Fontanès et Riverie à Claude Laurencin, issu d’une importante famille consulaire de Lyon, lequel vend ensuite la Seigneurie de Châtellus en 1555 à François des Gouttes.
En 1562, c’est la guerre des Religions avec le baron des Adrets. Il renouvelle à Chätelus ses expériences sanguinaires consistant à projeter depuis le haut du donjon, après la prise du château, les opposants sur des piques fixées au sol, comme cela s’est fait à Montbrison ou Montrond mais aussi plus près à Saint-Médard.
La seigneurie passe en 1576 aux mains des Mitte de Chevrières.
La terre est ensuite démembrée en 1654 : elle perd Grammont et Saint Christo. Châtelus est vendu à Camille Savary, comte de Brèves.
En 1673, ce sont les Bénéon, une famille originaire de Saint Symphorien-sur-Coise, qui se portent acquéreurs.
Plus tard c’est un légataire universel, en l’absence de descendance directe: Jean «dit» Grimod de Bénéon, qui vend à son tour la seigneurie en 1715 à Jean Guillet de Chavanne et son épouse Marie Alissant. Ils prennent alors le nom de Châtellus.
Depuis cette époque, la bourgade est restée dans la famille malgré quelques disputes. À la fin de l’ancien régime, le dernier seigneur de Châtellus était Jacques-Pierre Guillet, marié à Marie Rambaud de La Sablière et décédé en 1834 à Saint Symphorien. Aujourd’hui l’héritier du domaine, aujourd’hui propriété privée, est un descendant : le Comte Pierre de Châtellus.
Les monuments.
Le château (privé).
Du château médiéval, seule la tour de forme irrégulière est l’élément qui subsiste du bâtiment médiéval, mentionné à l’époque des Comtes du Forez. Ce donjon, en partie conservé, se présente aujourd’hui comme une tour à sept pans percée par de nombreuses meurtrières, haute de quatre étages qui communiquent entre eux grâce à un escalier à vis placé dans un des angles de la tour. L’ensemble est inscrit aux Monuments Historiques depuis 2004. On peut admirer la façade de l’habitation et le donjon depuis la rue qui mène à l’église. En arrivant par la route on parcourt une très belle allée de tilleuls qui arrive à la grille du château. Elle a été plantée en 1780, elle comporte 110 arbres sur une longueur de 270 mètres. Elle constituait jusqu’à la Révolution, l’allée d’honneur de la seigneurie. Celle-ci possédait un vingtain qui cernait les maisons, l’église, le cimetière, une grande porte et une poterne.
L’église
En 1173, l’église, alors chapelle, dépendait de l’abbaye de l’Ile Barbe. Elle était sous le vocable de Saint Julien. Devenue chapelle comtale, elle a été détruite avec ses archives en 1562 par le baron des Adrets.Elle a subi, à nouveau, d’importantes dégradations sous la Révolution. Elle est devenue église paroissiale en 1839. et s’est agrandie pour répondre aux besoins de la population. L’inauguration a eu lieu en 1861 avec la bénédiction du cardinal de Bonald, comme à Saint-Denis-sur-Coise. Le clocher, “façon suisse” recouvert de tuiles vernissées, a été construit en 1865. Deux restaurations successives du bâtiment, l’une en 1921 et l’autre en 1989, lui ont donné son aspect d’aujourd’hui.
Les deux chapelles latérales sont les éléments les plus anciens: parmi elles, l’ancienne chapelle gothique du château.
L’église comporte 3 cloches dont l’une date de 1537. Elle est classée monument historique depuis 1993. Elle comporte des figurines représentant la Résurrection du christ, un saint évêque, une vierge à l’enfant et Saint Laurent martyr. Une inscription dit « Sit nomen domini benedictum ex hoc nunc et usque in eternum »
Cette église se visite à l’occasion de “portes ouvertes”, lors de manifestations locales ou à l’issue d’un des rares offices religieux qui y ont donnés. Elle dépend aujourd’hui de la paroisse Saint Irénée des Monts du Lyonnais dont le siège est à Chazelles-sur-Lyon. Compte tenu des difficultés à y rentrer, nous vous proposons une suite non exhaustive de photos qui vous permettra d’appréhender la beauté et la simplicité de ce lieu, sépulture notamment de Jeanne Bernuset, épouse de Victor Guillet de Châtellus.
L’église renferme de très beaux vitraux réalisés dans la 2° partie du XIX° siècle par le célèbre vitrier Alexande Mauvernay, de Saint-Galmier. Ils sont très lumineux. Surprenant: on trouve une représentation de Bernadette Soubirous qui prie la Vierge à Lourdes. Le vitrail a été exécuté en 1876. Les apparitions datent de 1858. La sainte meurt en 1879: elle rentre de son vivant dans le “coeur” d’une église pour y apporter la lumière: le résultat d’une notoriété exceptionnelle? Une demande particulière à l’artiste-vitrier? Pour quelle raison? Si vous avez la réponse, faites le savoir à phiaac42140@gmail.com
Le vitrail de gauche peut correspondre à un adoubement. Nous suggérons pour entamer un débat qui ne manquera pas: Louis VIII est sur la fin de sa vie et adoube son fils Louis IX, le futur Saint-Louis, en présence de sa mère Blanche de Castille, la “dite” sainte reine et régente.
Les croix.
Sur le tertre du Châtelard, la croix des Bénéon date du XVIIème siècle et porte, sur le devant de son socle, les armoiries de la famille des Bénéon avec une inscription sur le revers : « Messieurs Jean et François Bénéon frères natifs de Saint-Symphorien, barons de Riverie, seigneurs de Châtellus, Saint-Denis et autres ont donné cette croix en l’année 1683 » (sur le terrain se trouve une copie de la croix, l’original est exposé à l’intérieur de l’église).
La fontaine.
Adossée au mur face à l’entrée actuelle du château, au carrefour des voies d’accès au village, la fontaine, en forme de porte monumentale, est ornée d’une coquille Saint-Jacques sculptée et porte sur son fronton l’inscription : « Tant que de fraîches eaux jailliront, arrête-toi passant, Jacques-Pierre Guillet de Châtellus accueille le voyageur et a érigé ce monument l’an du seigneur 1780 ». On l’appelle aujourd’hui « Fontaine de la Vierge » en raison de la statue de fonte qui la coiffe.
Les activités
Il faut bien sûr le promener dans le village et les chemins aux alentours pour trouver, ces vieilles portes, ces belles fermes..
Un parcours pédestre est organisé autour du village et permet de découvrir un paysage très accidenté et boisé alternant avec de beaux pâturages.
Après une bonne promenade matinale on peut venir se restaurer au centre du village à l’Auberge des Tilleuls qui propose des menus autour de produits locaux. Il s’y organise régulièrement des soirées à thème.
On peut découvrir l’art de la taille des pierres avec Vincent Blanchard au “Carteron”. On peut voir son travail dans une salle d’exposition certains après-midi dans la semaine. Des escales-découverte sont organisées régulièrement par l’Office de Tourisme de Forez-en-Lyonnais.
Un gîte dans une ferme typique des Monts du Lyonnais datant du 19ème siècle peut vous accueillir. Francis Masset vous y attend au Gîte de Châtelus à La Prébende.
Un personnage célèbre: Marius Vachon.
C’est un personnage peu connu qui a pourtant apporté beaucoup à l’art. Il est né à Châtelus. Il est apparenté à la famille Robert du village, lesquels demeurent dans la maison où l’on trouve une petite plaque-souvenir de cet homme né en 1850, passionné de vieux châteaux, d’architecture. Il va devenir critique d’art et secrétaire d’Emile de Girardin, propriétaire du journal “La France”. Il publie en 1880 une série de quatre volumes ayant trait à “L’art Français pendant la guerre et la commune”. Le travail est très remarqué et lui vaut le prix Bordin. Il poursuits ses recherches autour de l’Hôtel de Ville de Paris, du Mont Saint-Michel… Il s’intéresse aux musées européens pour les industries d’art inconnus en France et fait ainsi le tour de l’Europe. Rentré au pays il prend contact avec les Chambre de Commerce et propose la création de vitrines pour les industries d’art. Nommé inspecteur général du ministère de l’Instruction publique et des Beaux-Arts, il est à l’origine du Musée Municipal d’Art et d’Industrie de Saint-Etienne: en 1888 il fonde d’abord la Société d’art et d’industrie de la Loire, puis en 1889 il organise au Palais des Arts de Saint-Étienne une exposition d’arts industriels qui débouche sur la fondation du musée plus haut cité. Il en devient le conservateur en 1890. Il meurt en 1928. Il laisse d’innombrables travaux écrits de référence.
Un petit tour de Châtelus vient d’être fait. Il vous reste désormais à trouver un peu de temps de loisirs pour aller découvrir ce joli petit village qui ne demande qu’à vous accueillir. Il faut sortir des routes principales pour s’y rendre. Le village vaut surtout par sa nature qui nous offre des paysages incomparables aux différentes saisons: l’été offre un bleu unique dans le ciel et de l’or dans les prés, l’automne: un rouge-orangé incomparable, l’hiver: un blanc neigeux reposant et le printemps: un vert frais tonifiant.
Si vous avez la chance de trouver l’église ouverte, n’hésitez pas à franchir son porche, elle est de toute beauté. Vous n’aurez pas celle de monter par un escalier en colimaçon les quatre étages de la tour du château, à moins d’y être invité un jour, mais il y a beaucoup d’autres endroits dans la commune qui vous offrent une vue panoramique aussi étendue.