Géographie
La superficie de Viricelles est de 2 km2 avec une altitude minimum de 477 mètres et un maximum de 593 mètres. Viricelles (42140) se trouve dans le département de la Loire, en région Rhône Alpes, et est rattachée à la communauté de communes de Forez-en-Lyonnais. Depuis 2015, le village est dans le canton de Feurs (N°5). Avant la réforme des départements, il était dans le canton de Chazelles-sur-Lyon. La population actuelle est d’environ 425 personnes. Les villages les plus proches sont Maringes et Chazelles à 2 km d’un coté et d’autre de la commune. On trouve Meys au nord et Grezieu à l’est, Bellegarde à l’ouest. Sous la commune on a percé un tunnel du même nom qui a permis autrefois le passage de la ligne ferroviaire dite “Mangini” allant de Lyon Saint-Paul à Montbrison et ouverte en 1876, devenue ligne PLM ensuite puis SNCF avant de disparaitre en 1952. Le tunnel franchit la ligne de séparation des eaux entre le bassin Atlantique et Méditerranée. C’était un tunnel à voie unique de 625 m. de long et qui sert aujourd’hui de réserve à une variété de chauve-souris: la Barbastelle, dénombrée parmi celles dont la protection est considérée comme un enjeu européen en matière de conservation. Quatre autres espèces de chauve-souris peuvent être observées en hiver dans ce tunnel ; il s’agit du Grand Murin, du Vespertilion de Daubenton, du Vespertilion de Natterer et de l’Oreillard gris,
Sur le plan géologique, comme à Maringes et au bord de Virigneux, on trouve à Viricelles une roche primitive correspondant à du gneiss et du micaschiste chloriteux qui en s’oxydant à l’air prend une teinte rouge.
On trouve aussi en périphérie des poches d’argile qui ont été utilisées autrefois pour faire des briques (fabrique Pradelle). La terre arable est siliceuse et peu profonde. On y cultive généralement, quand il ne s’agit pas de paturages, des céréales. La plupart des exploitations agricoles sont orientées vers les produits laitiers.
De nombreuses rivières sont très proches, prennent leur source ou traversent la commune : l’Anzieux qui se jette dans la Loire puis l’Atlantique, la Brevenne qui se jette dans la Saône puis le Rhône et la Méditerranée: nous sommes sur une ligne de séparation des eaux. Il y a aussi le Berthelon, la Bourbonne ou la Gimond qui coulent très près.
Histoire
L’histoire de Viricelles commence par une petite chapelle qui est déjà notée en 1153 : certains disent que Viricella est une transformation de “valli cella” : la petite vallée, d’autres avancent qu’il s’agit d’une association de”veteris” ajouté à “cella” : le vieux monastère. Lors du Permutatio de 1173, Grezieu et les terres de Viricelles dont elles dépendent sont donnés par le comte du Forez à Guichard, archevêque de Lyon qui les mettra ensuite sous la dépendance de Saint Symphorien-le-Chateau. En 1290, on voit apparaitre dans les registres un chappelans de Viricella, puis en 1345 le village de Virisselle nait avec son église placée sous le vocable de Saint Etienne. Ce Virisselle va être acheté au XIV° siècle en même temps que Chevrières et d’autres terres par Guillaume de Mitte. Il est marié à Catherine Mauvoisin de Chevrières. En 1454, Grezieu et ses terres sont mise sous la dépendance du Chapitre de Lyon par Louis Mitte de Chevrières. En 1465, le château de Chevrières est détruit par le duc de Bourbon et les Mitte viennent habiter le château de Grezieu. Le roi Charles VIII et sa Cour viendront d’ailleurs en 1496 dans celui-ci pour rencontrer les Mitte.
On passe ensuite à Melchior Mitte jusqu’en 1649, date de sa mort. Il est remplacé par son fils Just Henri qui a épousé Suzanne Charlotte Catherine de Gramont, marquise de Saint Chamond et de Montpezat (1620-1688): il devient aussi marquis de Saint Chamond.
Criblé de dettes, comme l’était déjà son père, Just Henri vend la seigneurie de Grezieu et ses terres à Jean Gangnères (ou Gagnères ou Gagnières), un lieutenant général des Armées du roi Louis XIV. Il est maréchal de camp en 1650, chevalier de Saint-Louis, lieutenant-général des armées du Roi, conseiller d’Etat, gouverneur de Monaco et premier chambellan de Monsieur le frère du Roi. Marié à Anne Duchol, de Longes, il fait ériger cette terre en baronnie en 1650, puis en comté en 1656. Il prend alors le titre de comte de Grézieu-Souvigny. baron de Grézieu-le-Marché, seigneur de Viricelles, la Thivollière, etc.
Il meurt en 1673, est remplacé par son fils Jean-Camille, né en 1690 à Grézieu, qui devient lui aussi chevalier, comte de Souvigny, seigneur de Viricelles. Il est marié à Élisabeth-Renée Berryer, fille de Nicolas-René Berryer, seigneur de Ravenoville, procureur général du Grand Conseil, et d’Élisabeth-Nicole Ursule Arnolet de la Rochefontaine. Le couple a un enfant, Camille-René, né en 1721, qui meurt à la guerre sans succession, lors de la campagne d’Italie, en 1748. Renée Berryer, sa mère, hérite des terres qu’elle donne à son frère Nicola-René Berryer. Celui-ci n’a qu’une fille Marie-Elisabeth Berryer, qui épouse en 1758 Chrétien François de Lamoignon, marquis de Bâville. Par suite d’alliances, la succession est finalement recueillie par la famille Desvernay (ou Desveneys…) .
Les Desverneys des Arbres sont une famille ligérienne de Saint Symphorien de Lay. Antoine, un membre de la famille sera président du Conseil général de la Loire. Il est le fils de Pierre Desvernay.
C’est à peu près à cette époque, en 1765, que Viricelles devient une paroisse à la suite de l’action efficace du curé Etienne Freydière qui fonde aussi la première école locale en 1780.
A l’aube de la Révolution de 1789 , Grézieu-Souvigny est bourg, paroisse et château dans le Lyonnais, dépend de l’archiprêtré de Courzieu, de l’élection et de la sénéchaussée de Lyon, et assoit son autorité sur Viricelles qui obtient alors son orthographe d’aujourd’hui.
Au XIX° siècle, la révolution industrielle transforme Viricelles avec l’arrivée du train près du village grace à une gare sur la ligne Lyon-Montbrison. Celle-ci donne des ailes à la commune dont la population quintuple en quelques dizaines d’années pour arriver à près de 600 habitants en 1880. On assiste au développement de petits ateliers de tissage, de couture ou de foulage de cloches à chapeaux (28 foules en 1870). Une chapellerie est même ouverte et se spécialise dans les coiffes pour ecclésiastiques : les établissements Narbonnet.
Une tuilerie-briqueterie est ouverte par la famille Pradelle et emploie 16 ouvriers. Le téléphone arrive en 1900 avec une cabine (mais il ne se généralise qu’en 1968!). L’électricité apparait en 1904 dans les usines et les chemins où passe la ligne sont éclairés. Un tramway électrique fonctionne à partir de 1899 depuis la gare PLM (cette compagnie a alors racheté la compagnie des Dombes de la famille Mangini) jusqu’à Chazelles puis Saint Symphorien-sur-Coise où il est sensé rejoindre les lignes ferrées de la Compagnie Rhône et Loire (CRL) vers Lyon par Messimy ou Saint-Etienne par Saint Héand, ce qui ne sera jamais réalisé. Et pourtant malgré la présence à proximité de moyens de transports modernes, Viricelles n’a disposé d’une route carrossable qu’en 1933 lorsque le tramway a cessé de fonctionner. Auparavant les liaisons étaient assurées par de simples chemins tels que celui du Rameau, des Rampeaux ou de la Badouillère..
Le village aujourd’hui
L’église médiévale
L’église primitive du Moyen-Age, sous le vocable de Saint Etienne, n’existe plus aujourd’hui. Elle avait été réparée en 1835 grâce à un don de Louis-Philippe, roi de France, mais la reconstruction totale a finalement eu lieu en 1845. Les travaux ont été réalisés à l’époque par un maçon de Feurs, François Ballot aidé de nombreux artisans locaux et de la région. Elle est inaugurée en 1846 et prend le nom de l’Immaculée Conception dont la statue siège en haut du clocher.
La nef est à trois travées couverte en voutes d’arêtes prolongée par un chœur allongé avec deux bas-côtés. On trouve au fond du chœur deux grands vitraux.
Son clocher a la particularité d’être surmonté par une grande statue de la Vierge dont les mains sont tournées vers celles de la Madone de Meys au sommet d’un sanctuaire tout proche. Il y a autour une galerie que l’on peut parcourir à pied et qui offre une très belle vue dans toutes les directions. On y trouve deux cloches : la petite date de 1774, est dédiée à Saint Etienne et a pour marraine la comtesse de Souvigny, la plus grosse qui donne le “la” a été fondue en 1850 par la maison Burdin de Lyon et a pour parrain Jean Benoit Salignat (cultivateur de Viricelles marié à Benoite Serre en décembre 1831 ?).
Des bâtiments et des maisons
Comme dans les villages alentours, on trouve à Viricelles de nombreuses constructions qui utilisent la brique, soit comme ornement, soit comme matière principale à construire. Comme à Chazelles, on a de nombreuses maisons faites de pisé de machefer, résidu des chaudières à vapeur utilisées dans l’industrie du chapeau. Mais il y a aussi beaucoup d’habitations en pierre rose et en pisé de terre. Il faut se promener dans le village pour voir toutes ces variétés de matériau qui lui donnent un aspect patchwork.
Les croix
On compte comme dans tous les villages alentours de nombreuses croix réparties sur la commune : une dizaine. Certaines sont remarquables :
C’est le cas pour la croix du bourg remontant à 1857 : elle est en fonte et représente tous les éléments nécessaires à la Passion du Christ. Elle mérite à elle seule un article par sa curiosité. Elle vaut le détour, toute proche du bar-tabac de Mme Noêlle Mure sous l’église, gardienne de nombreux documents sur le village et que nous remercions. Aussi charmante journaliste, elle doit écrire l’histoire de cette croix.
Il y a aussi une croix monolithe à côté de la pompe à eau communale (qui vaut elle aussi le détour). Elle est en mauvais état, réparée avec des colliers mais a le mérite d’être encore debout avec un très beau Christ sculpté. Elle date de 1724.
Vous trouverez les autres au cours de vos promenades dans le village.
Des personnalités
L’histoire de Jean Baptiste Gonon
Jean Baptiste Gonon est un prêtre réfractaire. Il est né à Viricelles en 1756. Il est ordonné prêtre en 1784 et curé de Viricelles à l’aube de la Révolution. Refusant de signer avec les autorités, il doit exercer son ministère en cachette dans les Monts du lyonnais et vit comme un proscrit en se cachant chez des amis à Chazelles. Mais il est dénoncé et, en 1794, il est arrété dans cette ville, transféré à Montbrison puis à Feurs. Après un court procès, il est condamné à mort et guillotiné la même année avec deux autres ecclésiastiques. L’histoire a été reconstruite par l’abbé Durand, un curé de Viricelles du début du XX° siècle, membre de la Diana. Elle a fait l’objet d’une belle publication que l’on peut retrouver sur Gallica. On peut y sentir l’ambiance de cette période sanglante de la Révolution dans la région.
Marius Berger
Jean-Antoine (Marius) Berger est né le 20 juin 1868 à Viricelles. Il prépare l’Ecole Normale à Chazelles avec son ami, le poête Jules Troccon, et y entre en 1885. Fort en dessin, il s’oriente vers cet enseignement qu’il pratique dans les lycées et collèges, à l’Ecole des Mines et celle des Beaux-Arts de Saint-Etienne. Il expose d’ailleurs longtemps dans cette ville. Il devient membre, comme son ami Troccon, du “Caveau Stéphanois”. Il a réalisé au cours de sa vie de nombreux tableaux dont on peut voir un exemple dans l’église de Viricelles (il s’agit d’un tableau représentant le Christ en croix que l’artiste avait promis de réaliser pour l’église si son épouse guérissait: il est reproduit plus haut au paragraphe de l’église) ou à l’Atelier-Musée du Chapeau de Chazelles (il représente un atelier de chapellerie). Il décède à Viricelles en 1957 à la villa Samouva qui était son domicile. Albert Néel, le peintre chazellois, est un parent de Marius Berger par sa mère qui était une fille Néel. Maurice Montagnon, talentueux photographe, qui habite aujourd’hui à Viricelles, est aussi de sa famille.
“La route du pisé” de Fernand Poncet et Vibrevan’z.
Au lieu-dit “le Feuillat” à Viricelles, on trouve l’association la “Route du Pisé” où l’on peut découvrir un bâtiment en pisé de construction récente qui abrite une bande de compagnons prêts à vous expliquer comment on construisait autrefois les maisons de la région et comment on peut aujourd’hui faire de même avec un peu de courage. Fernand Poncet, fondateur de Vibrevan’z*, est “l’âme” de cette animation et vous passionnera.
* (Vi -ricelles/Brev -enne/Anz -ieux) ou Vibrevan’z est une association loi 1901 créée il y a 22 ans par des habitants de Viricelles avec l’idée d’apporter des spectacles de qualité en zone rurale, de faire découvrir des artistes pas forcément connus mais méritants. Pour cela la Saison des Vivats s’impose depuis quelques années dans les rendez-vous culturels de la région. Pendant 20 ans, la Fête de l’épouvantail de Vibrevan’z avait garanti chaque année un été festif; d’abord pour les villageois qui s’investissaient avec passion dans la préparation de la fête mais aussi pour les 6 à 8000 visiteurs accueillis à chaque fois. Cette manifestation annuelle a malheureusement été mise en sommeil.
(Le peintre chazellois Albert Néel est intimement lié à Vibrevan’z, à la fête des épouvantails avec son ami Serge Féchet, photographe, une autre pierre angulaire de l’association.)
Claude Protière
C’est un résistant du groupe “GMO liberté” dirigé par Adrien Monier, alias capitaine “Rodolphe” et issu du secteur de Chazelles-sur-Lyon. Il participe aux opérations militaires visant à enpêcher les soldats allemands de rentrer au pays en toute tranquilité dans cette deuxième moitié de l’année 1944 où Saint-Etienne a subi un violent bombardement allié en juin. Son nom de guerre est “Léon”. Le 13 aout 1944, Claude Protière se poste sous un pont à la sortie nord du tunnel de Viricelles, par dessus lequel passe la voie ferrée Lyon-Montbrison, avec 16 hommes: un convoi de munitions allemandes est attendu. Mais c’est un train emportant 200 miliciens qui arrive en sens inverse. Claude Protière est abattu alors qu’il s’apprète à arrêter ce convoi. La fusillade entamée se poursuit et 2 autres membres du groupe sont blessés. Le train continue sa route. On n’a jamais su l’importance des dégats qu’ont subi les miliciens foreziens qui fuyaient Saint-Etienne par ce convoi. Chaque année se déroule une commémoration de cet épisode tragique de la Résistance dans la région. Claude Protière possède une stèle au cimetière de Viricelles pour rappeler l’évènement mais est enterré dans le caveau familial de Chazelles-sur Lyon.
Quelques histoires à propos de Viricelles.
Le problème de l’eau.
L’eau a souvent posé problème à Viricelles même si cette commune est proche de deux sources : celle de la Brevenne et celle de l’Anzieux. Jusqu’au XX° siècle, l’alimentation se faisait par les puits (ils étaient au nombre de 18) dont un communal construit près de l’école au milieu du XIX° siècle. Lors du percement du tunnel sous le village en 1870, la plupart des puits se sont asséchés du fait de la modification des nappes d’eau et les habitants ont du aller chercher l’eau à pleines charrettes pour les petites usines et l’usage personnel dans une source privée située à près d’un kilomètre. La Compagnie des Dombes, alors responsable, décline toute aide. Il s’en suit un long procès de près de 10 ans pendant lesquels on reconstruit fontaines et puits.
En 1906, c’est Chazelles qui capte l’eau de la Bourbonne au détriment de Viricelles alors que ce dernier pensait avoir trouvé la solution à son problème chronique de manque d’eau. Et finalement c’est en 1951, que Viricelles demande à être rattaché aux eaux de Chazelles avec installation d’un reservoir au Mont. Celle-ci n’arrivera dans tous les éviers qu’en 1956.
Le tramway électrique VCS (Viricelles-Chazelles-Saint Symphorien)
Il a fait l’objet de nombreux écrits auxquels on peut se référer. Chazelles-Histoire reprend ces publications et nous permet de revivre cette épopée. L’auteur de cet article a aussi raconté l’histoire de ce tramway dans une publication récente de l’Araire : « Des lignes et des Hommes » numéro 177, que l’on peut se procurer au siège de l’Association. Nous sommes au milieu de l’époque florissante des tramways électriques, à la fin du XIX° et au début du XX° siècle, mais aussi à la naissance de l’électricité en France avec les premières lignes à haute tension pour le transport de l’électricité. Le tramway VCS va y jouer, curieusement, un grand rôle. Nous vous en parlerons bientôt.
Le sentier botanique et des épouvantails.
Une manière agréable de découvrir les plantes et les arbres de notre région consiste à prendre le sentier botanique balisé de Viricelles. Des épouvantails placés sur le sentier vous accompagneront tout au long de votre balade.
Voici retracés en quelques lignes, des siècles d’histoire, de nombreuses pages de la vie de ce charmant village qui possède une vivacité étonnante, propose des spectacles réguliers de grande qualité, a un potentiel d’animation élevé. Cela contraste avec l’apparente torpeur qu’offre ce bourg quand on le traverse sans s’arrêter pour rejoindre une nationale bourdonnante. Il faut bien sûr aller poser sa voiture sur le parking de l’église et arpenter rues et chemin, prendre un café chez Noëlle Mure, provoquer une rencontre avec Fernand Poncet et d’autres passionnés, pour sentir l’âme de Viricelles. Loin des bruits inutiles, il doit faire bon y rester quand on veut vivre “bien”.