La vie à Paris : Peladan et la mort de Seurat.

Avec Courbevoie, Alexandre Séon a obtenu la notoriété.

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Le pavillon de Paris à l’Exposition Universelle de 1889

Il a exposé son plafond à l’Exposition Universelle de 1889, celle de la création de Tour Eiffel, dans les salons du pavillon de Paris. Il rencontre aussi, grâce à Seurat, de nouveaux peintres néo-impressionnistes et des personnalités qui se rapprochent de ses ambitions picturales. Comme beaucoup de peintres de l’époque, Puvis de Chavannes en tête, il prétend associer aux traits, aux couleurs et aux tons des mots qui forment ainsi un langage. S’en suit un presque dictionnaire qui permet au peintre de faire parler son tableau. Notre artiste comme son ami Seurat sont très orientés sur cet aspect symbolique de la peinture.

COULEURS

Deux pages du Traité des Couleurs de Alexandre Séon

Dans le même temps où le premier développe le pointillisme pour exhaler les tons synonymes de mots faisant presque disparaitre le relief, le second reste attaché à son dessin, à la perspective formée par les lignes et au langage symbolique exprimé par les couleurs et la lumière. Il écrit d’ailleurs un traité sur les couleurs et la lumière.

Alexandre Séon se plait dans ce mouvement symbolique initié au départ par Jean Moréas pour une orientation de la littérature mais pris en chemin par des peintres comme Redon ou Moreau, des musiciens comme Wagner, Debussy ou Satie. Cette attraction pour le symbolisme est internationale.

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Josephin Peladan dit le Sâr

C’est autour de ce mouvement que gravite Joséphin Péladan, un écrivain d’origine lyonnaise, tout imprégné de romantisme et d’occultisme allant à  contre-pied du naturalisme d’Emile Zola. En 1888, il est le co-fondateur de l’Ordre Kabbalistique de la Rose-Croix.  

Alexandre Séon le rencontre à l’occasion d’un voyage en bateau le long des côtes bretonnes et vers l’île de Bréhat en 1890 sur le yacht « Le Mage » de la Rose+Croix. La fusion entre les deux hommes est presque parfaite et tandis que le peintre se détache de Puvis de Chavannes, il rentre la même année dans le nouvel Ordre de la Rose+Croix catholique du Temple et du Graal, une scission du mouvement précédent considéré comme trop œcuménique  et pas assez catholique par Peladan qui a pris en même le titre assyrien de « Sâr Mérodack Peladan» pour poursuivre sa lutte conte le réalisme avec le retour aux mythes anciens. Les deux hommes ne vont pas se quitter.

En 1891, son ami Georges Seurat meurt brutalement d’un probable croup, une mauvaise angine. Séon poursuit la présentation de tableaux à Saint-Etienne ou Lyon, la même année sans beaucoup de succès. Le symbolisme passe mal aussi à Paris et sa peinture est refusée notamment pour l’Hôtel de Ville de Paris. L’idée de créer un salon propre au mouvement se fait jour et c’est ainsi qu’à partir de 1892 l’Ordre de Rose+Croix va ouvrir un salon des Arts international. C’est Séon qui fait le programme : il expose à cette occasion de nombreuses toiles dont un portrait du Sâr Peladan et une Jeanne d’Arc, La manifestation reçoit un extraordinaire accueil.

Erik Satie a composé pour l’occasion les Sonneries de l’Ordre. Parallèlement il continue à proposer ses services aux municipalités pour la décoration des bâtiments publiques sans beaucoup de succès en raison de son appartenance à Rose+Croix et de ses rapports difficiles avec l’administration. Ses toiles, malgré sa reconnaissance par le monde artistique restent sans acquéreur car il s’est un peu marginalisé. Puvis de Chavannes a disparu de son entourage. En 1893 il organise à nouveau avec Péladan le second salon de la Rose+Croix où il expose 37 œuvres.

Attachement à l’île de Bréhat.

brehatEn 1894, après avoir plusieurs fois séjourné dans l’île de Bréhat dont il est devenu amoureux fou, il occupe une petite maison de pécheur qu’il appelle « Simplicity House » : il est rentré récemment d’un voyage en Angleterre ! Cette demeure deviendra dans quelques années sa propriété. Beaucoup de ses œuvres vont désormais comporter une référence à ce petit bout de terre sur l’Océan qui va devenir le support d’un symbolisme de plus en plus affirmé. Cette année-là, remarqué pour la première fois par Saint-Etienne, il y tente une percée mais son caractère entier rebute encore les autorités : il ne vend ni une toile ni un projet de décors de la préfecture. Il revient en 1895 au Salon de la Rose+Croix qu’il avait déserté, tente sans succès une aventure internationale à Bruxelles et reste en contact avec le Forez où il compte bien finie par percer malgré une opposition forte des artistes locaux. La réussite vient l’année suivante, en 1896, avec l’achat par le Musée de Saint-Etienne de sa toile « Le Poète » grâce au soutien de Jean Grivolat, le conservateur, et de Félix Thiollier, un mécène forézien, photographe d’art qui fait partie du groupe des artistes foréziens à Paris comme Séon.

Pendant toute cette période de 1889 à 1887, Alexandre Séon est professeur titulaire des écoles de de la Rue de Meaux et de la Place de Bitche, ce qui lui assure un salaire de 2400 francs. Mais il est aussi passionné d’enseignement de l’art et va participer à l’aventure nouvelle des universités populaires…

A suivre.